Rédigé le : 14 Août 2019 Par : Melchior Burin des Roziers
Autrefois connue sous le nom de Mosquée Al Mansour, du nom du sultan qui l’a fait édifier au XIIème siècle, la Mosquée aux Pommes d’Or se repère de loin grâce à son minaret de 80 mètres de haut. Sobre et très finement décorée, elle rivalise de beauté avec la Mosquée Koutoubia. Apprenons-en un peu plus sur cet édifice incontournable de la Kasbah, au coeur de la Médina.
Suite à une commande du calife Yaqub al-Mansour, la construction de la Mosquée de la Kasbah s’achève en 1190, en plein apogée de l’Empire almohade. Elle est alors envisagée comme étant la mosquée du vendredi (ou grande mosquée) pour les prières du calife ainsi que pour le quartier royal. A travers les siècles, elle restera très prestigieuse et accueillera à son pied les dépouilles de personnalités importantes à partir de l’ère mérinide. L’endroit deviendra même le siège de la nécropole royale des Saadi.
Mais en 1569, il faut presque tout reconstruire à cause des dégâts considérables causés par l’explosion d’un magasin de poudre à canon. Il semble que le sultan Saadi Moulay Abd Allah al-Ghalib soit resté assez fidèle au tracé almohade initial, bien que le décor intérieur s'adapte désormais au style saadien. La Mosquée s’offre une nouvelle vie, en tout état de cause, malgré la présence de longues fissures dans le minaret qui resteront visibles jusqu’au XXème siècle. Entre temps, la mosquée connaîtra une ultime série de restaurations importantes à l’initiative du sultan alaouite Sidi Muhammad Ibn Abd Allah (qui régna de 1757 à 1790). Dans ce contexte, on verra apparaître quelques nouveaux éléments, dont une coupole en bois à l’entrée centrale de la salle de prière.
Depuis plusieurs siècles, les habitants du quartier ont baptisé l'édifice du nom de “Mosquée aux Pommes d’Or”, puisque 4 boules de cuivre doré ornent le lanternon du minaret. La légende raconte qu’elles proviennent des bijoux en or de l’épouse du sultan al-Mansour, que l’on aurait fondus pour l’occasion. Au passage, certains conteurs de la place Jemaâ El-Fna vous raconteront comment, au XVIIIème siècle, des prisonniers français et anglais qui avaient réussi à s’évader de leur geôle, essayèrent de repartir avec les fameuses pommes d’or. Bien entendu, on les arrêta à temps et ils eurent la tête tranchée puis exposée sur les vantaux de Bab Agnaou. Voilà de quoi “avoir les boules” (ou pas !).
Aujourd'hui, la mosquée est toujours utilisée pour la prière. Cependant, les non-musulmans ne sont pas autorisés à entrer à l'intérieur (comme dans les autres mosquées du Maroc). Vous devrez donc vous contenter de contempler l’extérieur de l’édifice.
Un splendide chef-d’oeuvre architectural
On vous épargne la description de l’intérieur de la mosquée (composée d’une salle de prière et de 11 nefs) puisqu’il est fort probable que vous n’en voyiez rien. Toutefois, vous pourrez observer le minaret large de 8,80 mètres, décoré d’entrelacs en losanges, qui a longtemps été le prototype des minarets d’inspiration hispano-mauresque. On peut aussi admirer une jolie frise de faïence turquoise entourée de bandes blanches. Entre les carreaux de mosaïque géométrique et les merlons, on aperçoit actuellement une bande horizontale vide. Elle était autrefois couverte d’une inscription arabe en tuiles de cuerda seca avec des lettres sombres (peut-être violettes) sur fond blanc. Cette écriture coufique présentait la première sourate du Coran, Al-Fatiha. Mais hélas, elle n’a pas survécu, bien que des fragments aient été retrouvés.
La décoration des quatre côtés du minaret paraît identique mais il existe de subtiles différences entre les façades nord et sud d'une part et les façades est et ouest d'autre part. Les détails des formes du motif sebka et des arcs polylobés de la façade inférieure varient légèrement.
Le minaret ocre est enfin surmonté d’un lanternon de 4 mètres de diamètre, coiffé également de tuiles vertes, bleues et turquoises. C’est de là que sonne régulièrement l’appel du muezzin à la prière, qui fait se hâter tous les fidèles du quartier vers la mosquée, y compris les commerçants qui n’hésitent pas à délaisser leurs échoppes le temps d’une prière.
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